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"Pierre Lévy" entries.

March 08, 2005

Le féminisme comme un racisme ?

Comme c'est aujourd'hui la Journée de la Femme, je tiens bon de rappeler que toute différenciation basée sur une catégorie (par extension une communauté) peut être considérée comme un racisme...

Racisme

De scandaleuses injustices et d'insoutenables misères naissent, le saviez-vous, d'une faute de logique, souvent commise, qui consiste à confondre votre identité avec l'une ou l'autre parmi vos appartenances.
Par la première, singulière, vous êtes vous-mêmes, individu ou personne inimitable, telle que, sans doute, la génétique jamais avant vous ne la trouva ni ne la répétera aussi longtemps que dureront les vivants.
Par les secondes, toujours collectives, vous faites partie des Français ou des Algériens, des bruns ou des chauves, mâles ou femelles, Blancs ou Noirs, chrétiens ou athées, savants ou bacheliers, que sais-je.
Le racisme, par exemple, consiste à traiter quelqu'un comme si sa personnalité s'épuisait en l'une de ses appartenances, choisie et persécutée : vous êtes noir ou mâle ou catholique ou roux. Ainsi, parler de l'identité masculine ou nationale revient à réduire la personne à une catégorie ou le collectif à l'individuel : faute de logique, dangereuse humainement. Non, vous ne faites que partie de tel pays ou de votre sexe.
De là fondent sur le monde tant de malheurs qu'il faut redresser cette commune erreur.

Les arbres de connaissances, Michel Authier et Pierre Lévy, Éditions La Découverte [pages 8-9, collection Poche/Essais (1998)]

Posted by Jean-Philippe on March 08, 2005 2 Comments, 168 TrackBacks

November 10, 2004

Toute ressemblance avec de précédents propos...

Je souligne :
« Comme les producteurs primaires et les demandeurs peuvent entrer directement en contact les uns avec les autres, toute une classe de professionnels risque désormais d'apparaître comme des intermédiaires parasites de l'information (journalistes, éditeurs, enseignants, médecins, avocats, cadres moyens) ou de la transaction (commerçants, banquiers, agents financiers divers) et voient leurs rôles habituels menacés. On appelle ce phénomène la « désintermédiation ». Les institutions et métiers fragilisés par la désintermédiation et l'accroissement de transparence ne pourront survivre et prospérer dans le cyberespace qu'en accomplissant leur migration de compétences vers l'organisation de l'intelligence collective et l'aide à la navigation. » (Remarquez la problématique du rôle des journalistes si l'on considère l'expansion continuelle de la blogosphère, identique à celle de la question des enseignants.)
et plus loin :
« Quant à l'exploitation économique des contenus en question, les manières habituelles de valoriser la propriété sur l'information (achat du support physique de l'information ou paiement de droits d'auteurs classiques) sont de moins en moins adaptées au caractère fluide et virtuel des messages. En abandonnant totalement toute prétention à la propriété sur les logiciels et l'information, comme certains activistes du réseau le proposent, on risque de revenir en deçà de l'invention du droit d'auteur et du brevet, à l'époque où les idées suées par des travailleurs du neurone pouvaient être bloquées par des monopoles ou appropriées sans contrepartie par des puissances économiques ou politiques. Mais à l'époque de l'économie de l'information et de la connaissance, plutôt que d'abandonner les droits de propriété sur toutes les formes de biens logiciels, ce qui reviendrait à une spoliation éhontée des producteurs de base, des nouveaux prolétaires que sont les travailleurs intellectuels, on semble plutôt s'orienter vers une sophistication du droit d'auteur. Ce perfectionnement se poursuit dans deux directions : passage d'un droit territorial à un droit du flux et passage de la valeur d'échange à la valeur d'usage. »

Qu'est-ce que le virtuel ?, Pierre Lévy, Éditions La Découverte (1998)
[pages 60 et 62, collection Poche]

Posted by Jean-Philippe on November 10, 2004 3 Comments, 169 TrackBacks

January 31, 2004

Dantec, Teilhard... et Lévy

« Parution simultanée de deux ouvrages de Pierre Lévy, « penseur » du cyberespace, exilé lui aussi de France au Québec.
Voici ce que cet histrion de la world philosophy nous inflige, dans un ouvrage pondu à deux, lui et sa femme (c'est la grande époque de la littérature en couple, autant dire de son annihilation), et qui ne trouve sa vraie place qu'au rayon mysticisme new-age de la première librairie astrologique venue : « La pensée nous amène à souffrir. Elle nous entraîne dans l'avidité, l'agression, la peur, l'espoir, l'illusion. Si nous nous contentions de sentir (c'est moi qui souligne), nous éviterions tout naturellement la souffrance. »
Nous contenter de sentir. Arrêter la pensée. Supprimer la souffrance. »

Si vous possédez l'édition nrf, vous êtes en bas de la page, un filet de bave coule délicatement mais néanmoins dangereusement vers votre livre préféré (oui, je suis maniaque, d'ailleurs je ne suis pas fier de moi car j'ai bavé dans la semaine sur mon Babylon Babies, mais c'est une autre histoire)... la souffrance en bas de page, ça met en appétit. Reprenons :

« Le programme est clair, il l'a toujours été : bouffez végétarien, faites de la méditation, développez votre « potentiel personnel ». Achetez mes cassettes.
Voici donc ce que le cyber-universitaire de la première (dé)génération postsoixantuitarde fait de deux mille cinq cents ans d'esprit critique occidental, devenu depuis un certain temps déjà la cible privilégiée de tout ce que l'Occident lui-même peut produire de nihilismes (autant dire une industrie). Il n'est pas le seul de son espèce à cracher ainsi dans la main qui l'a généreusement nourri. Même les plus féconds d'entre les penseurs sont désormais tentés d'imiter cette pathétique parodie de révolte œdipienne.
La régression new-age n'a pas toujours la naïveté d'affirmer haut et clair un tel programme, l'anéantissement de la pensée est parfois habilement camouflé par quelque jargon pompeux ou posture de rébellion. Pierre Lévy a le mérite d'exposer sa non-pensée sans le moindre artifice, et avec l'aplomb qui caractérise l'idiot terminal : world philosophy (on croirait à s'y méprendre la dernière campagne de pub Benetton ou de l'Unesco, ou le dernier disque de Sting), néopaganisme solaire, astrologie du feu, humanitarisme pseudo-bouddhiste et adaptation (post)moderne du christianisme noosphérique de Teilhard de Chardin, bref un effondrement général de la pensée qui, bien sûr, vise à s'ériger comme finalité téléologique du « phénomène humain », et nous conduit automatiquement au fou rire. »

Maurice G. Dantec, Laboratoire de catastrophe générale – Le théâtre des opérations, Journal métaphysique et polémique, 2000-2001
[pages 107-108, Éditions Gallimard (2001)]

Posted by Jean-Philippe on January 31, 2004 8 Comments, 0 TrackBacks

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