Quand une légère grise vous enveloppe
Ca y est... je suis de retour. De retour d'une image d'un futur qui ne sera pas mien. J'ai l'impression de courir après mes caprices parfois, enfin non, je devrais dire : tout le temps. Plus précisément, ça doit se situer entre caprice, nonchalance, fainéantise, détournement de futur mineur, espoir d'avenir majeur.
J'abandonnais pour un temps, il y a quelques années, l'idée de devenir ingénieur : c'est vrai, pensai-je alors, c'est un métier fait pour gagner beaucoup de fric rapidement, se caser, bref une vie d'anti-débauche ne me convenant guère (se disait sans trop y croire le Jean-Philippe perturbé). Après tout, mon altruisme naissant m'interdisait de pratiquer un métier ne servant à pas grand chose pour les autres, je veux dire, ceux qui veulent être heureux. Finalement la recherche ne devait pas être une si mauvaise idée.
Car pour chercher, il faut découvrir et apprendre : découvrir de nouveaux horizons, apprendre ce qu'on n'a jamais très bien connu. Mais peu à peu tu déchantes. Ce nouveau monde est un anti-monde. Une fiction de la réalité. Notre héros, le chercheur des temps modernes, ne sait pas s'habiller. Et pour moi c'est grave. Ce manque d'esthétisme cache quelque chose de plus profond, comme un refus de prendre contact avec la réalité, d'attirer le regard les autres, d'intéresser par le paraître. Le chercheur pour se rattraper parle trop souvent travail, croyant peut-être parfois que c'est la seule manière de se définir (note : la chercheuse est d'ailleurs bien souvent célibataire, ou alors mariée à un chercheur – bah oui, souvenez-vous, elle est habillée comme un sac poubelle...). Ce petit être est bien souvent aigri, et considère souvent son environnement avec hauteur : pourquoi une serveuse est serveuse ? La réponse du chercheur est qu'elle ne sait sûrement faire que ça. Là, ça y est, mon dégoût me fait vomir. Notre petit animal aime aussi à se retrouver en groupe, pour parler de sa façon de voir le monde. À ce moment, le meilleur moyen d'exister pour lui est de poser des questions dont il connaît bien souvent la réponse, et qui ne font que peu avancer le problème ; d'ailleurs le chercheur adore faire passer tous ses travaux comme des succès, ou alors glorifie ses échecs. Notre animal à l'affreuse compagnie croit pouvoir modéliser le monde, le connaître, le contrôler, le dominer par sa science. Toute cette petite communauté s'auto-congratule bien souvent pour mieux se renfermer, c'est ce qu'on appelle l'ouverture de notre belle science au monde.
Finalement les chercheurs renient bien trop souvent le vrai.
Le vrai c'est ce qui nous entoure, la société, sa composante frontale : le social – les individus, les groupes.
Le chercheur apporte-t-il quelque chose à la société ?
Le chercheur peut-il rendre les gens heureux ?
La recherche peut-elle me rendre heureux ?
Ca y est, moi aussi je suis aigri.
Posted by Jean-Philippe on May 08, 2004 19 Comments, 243 TrackBacks