Notebook / Archives / "Michel Houellebecq"

"Michel Houellebecq" entries.

May 08, 2003

« Au même moment »


« Nous fîmes une pause rapide pour aller déjeuner. Au même moment, à moins d'un kilomètre, deux adolescents de la cité des Courtilières éclataient la tête d'une sexagénaire à coups de battes de base-ball. En entrée, je pris des maquereaux au vin blanc. »

Michel Houellebecq, Plateforme (2001)
[page 247, Éditions J'ai lu]

Posted by Jean-Philippe on May 08, 2003 16 Comments, 0 TrackBacks

May 02, 2003

Michael Jackson : première star de l'humanité ?

« (...) Je jetai alors les bases d'une théorie plus compliquée et plus douteuse: en résumé, les Blancs voulaient être bronzés et apprendre des danses de nègres ; les Noirs voulaient s'éclaircir la peau et se décrêper les cheveux. L'humanité entière tendait instinctivement vers le métissage, l'indifférenciation généralisée ; et elle le faisait en tout premier lieu à travers ce moyen élémentaire qu'était la sexualité. Le seul, cependant, à avoir poussé le processus jusqu'à son terme était Michael Jackson : il n'était plus ni noir ni blanc, ni jeune ni vieux ; il n'était même plus, dans un sens, ni homme ni femme. Personne ne pouvait véritablement imaginer sa vie intime ; ayant compris les catégories de l'humanité ordinaire, il s'était ingénié à les dépasser. Voici pourquoi il pouvait être tenu pour une star, et même pour la plus grande star – et, en réalité, la première – de l'histoire du monde. Tous les autres – Rudolf Valentino, Greta Garbo, Marlène Dietrich, Marilyn Monroe, James Dean, Humphrey Bogart – pouvaient tout au plus être considérés comme des artistes talentueux, ils n'avaient fait que mimer la condition humaine, qu'en donner une transposition esthétique ; Michael Jackson, le premier, avait essayé d'aller un peu plus loin. »

Michel Houellebecq, Plateforme (2001)
[pages 227-228, Éditions J'ai lu]

Posted by Jean-Philippe on May 02, 2003 25 Comments, 0 TrackBacks

April 28, 2003

« Plateforme »

« (...) Un jour, à l'âge de douze ans, j'étais monté au sommet d'un pylône électrique en haute montagne. Pendant toute l'ascension, je n'avais pas regardé à mes pieds. Arrivé en haut, sur la plateforme, il m'avait paru compliqué et dangereux de redescendre. Les chaînes de montagnes s'étendaient à perte de vue, couronnées de neiges éternelles. Il aurait été beaucoup plus simple de rester sur place, ou de sauter. J'avais été retenu, in extremis, par la pensée de l'écrasement ; mais, sinon, je crois que j'aurais pu jouir éternellement de mon vol. »

Michel Houellebecq, Plateforme (2001)
[pages 310-311, Éditions J'ai lu]


Posted by Jean-Philippe on April 28, 2003 16 Comments, 0 TrackBacks

April 10, 2003

Fureur d'achats

Je suis passé assez brièvement hier à la Fnac du Forum des Halles... et après mes fureurs d'achats Dantec puis Houellebecq des dernières semaines, je me suis cette fois déchaîné sur Frédéric Beigbeder (dont j'avais déjà lu 99 F... hum, excusez-moi : 14,99 €).
J'ai ainsi acheté : Vacances dans le coma (1994), L'amour dure trois ans (1997), Nouvelles sous ecstasy (1999) et Dernier inventaire avant liquidation (2001). Malheureusement, je n'ai pas réussi à trouver Mémoires d'un jeune homme dérangé.
Pour alléger ma conscience, Nouvelles sous ecstasy fut dévoré dans la soirée...

J'en ai aussi profité pour compléter ma collection Houellebecq, avec Rester vivant et autres textes (1991, mais 1999 pour l'édition Librio) et Lanzarote et autres textes (2002). Je cherchais d'autres ouvrages, notamment les poésies, mais je ne les ai point trouvées.

Posted by Jean-Philippe on April 10, 2003 4 Comments, 0 TrackBacks

Les lectures du moment

jpNotebook_reading_20030409.jpg
Dans la nuit d'avant hier, j'ai terminé les Interventions de Michel Houellebecq, lecture rapide et facile pour un collage de textes qui recèle quelques bonnes surprises. Parallèlement et après des débuts difficiles, on peut dire que j'apprécie maintenant pleinement L'insoutenable légèreté de l'être de Milan Kundera. J'ai déjà placé quelques extraits de ces deux ouvrages sur ce site (d'autres sont probablement à venir). Enfin, dans ma volonté de lire tout ce qu'a écrit Maurice G. Dantec (romans, journaux polémiques et métaphysiques, interviews), je commence lentement Les racines du mal.
Je m'aperçois cependant peu à peu que Houellebecq et Dantec sont deux auteurs relativement commerciaux (ce qui n'enlève rien à l'intérêt personnel que je peux leur porter). Houellebecq est très aisé à lire, même amusant par son cynisme dégoulinant... on est cependant encore loin de la prose d'un Camus. Quant à Dantec, bien que j'aie été fasciné par les deux tomes de son journal (Le théâtre des opérations puis Laboratoire de catastrophe générale), je suis pour l'instant un peu déçu par ce broyeur de pensée unique en tant que romancier, après avoir dévoré La sirène rouge : l'intrigue étant trop simpliste et les personnages présentés à l'aide de procédés trop scolaires. On sent vraiment que son style s'est amélioré et a même changé en bien avec Les racines du mal ; il en va de même pour sa maîtrise des structures scénaristiques. Comme Dantec l'avoue lui-même, il est brouillon, ce qui ne dérange pas trop dans des romans de littérature totale. Mais dans ses réflexions, certaines imprécisions commencent à me poser problème, notamment par le peu de sources qu'il cite (je pense que je développerai ce point lorsque j'aurai fini de lire toutes ses productions).
On trouve aussi dans mon tohobuhu littéraire actuel La pierre et le sabre de Eiji Yoshikawa, roman que j'ai commencé il y a de cela plusieurs mois et dont j'ai arrêté net la lecture faute de temps. Je viens tout juste de m'y remettre.
Pour boucler cette liste, certains remarqueront un phrasebook d'espagnol d'Amérique latine... voyez-y ce que vous voudrez...

Posted by Jean-Philippe on April 10, 2003 30 Comments, 0 TrackBacks

April 09, 2003

Y'en a qui méritent plus que des paires de claques

« Ses soucis retombèrent sur lui d'un seul coup, dès qu'il eut franchit la porte de l'appartement. Johanna, la baby-sitter, vautrée dans le canapé, regardait MTV. Il haïssait cette préadolescente molle, absurdement groove ; chaque fois qu'il la voyait il avait envie de la bourrer de paires de claques, jusqu'à modifier l'expression de sa sale gueule boudeuse et blasée. C'était la fille d'une amie d'Audrey.
(...)
Il passa dans la cuisine, se servit un verre d'eau. Ses mains tremblaient. Sur le plan de travail, il aperçut un marteau. Les paires de claques n'auraient pas été suffisantes pour Johanna ; ce qui aurait été bien, c'est de lui défoncer le crâne à coup de marteau. Il joua quelques temps avec cette idée ; les pensées se croisaient rapidement dans son esprit, assez peu maîtrisées. Avec effroi, dans le vestibule, il s'aperçu qu'il tenait le marteau à la main. (...) »

Michel Houellebecq, Plateforme (2001)
[pages 252-253, Éditions J'ai lu]

Posted by Jean-Philippe on April 09, 2003 7 Comments, 0 TrackBacks

April 07, 2003

« Oui, c'est cela : un peu plus seulement. »

« (...) Il est faux de prétendre que les êtres humains sont uniques, qu'ils portent en eux une singularité irremplaçable ; en ce qui me concerne, en tout cas, je ne percevais aucune trace de cette singularité. C'est en vain, le plus souvent, qu'on s'épuise à distinguer des destins individuels, des caractères. En somme, l'idée d'unicité de la personne humaine n'est qu'une pompeuse absurdité. On se souvient de sa propre vie, écrit Schopenhauer, un peu plus que d'un roman qu'on aurait lu par le passé. Oui, c'est cela : un peu plus seulement. »

Michel Houellebecq, Plateforme (2001)
[pages 175, Éditions J'ai lu]

Posted by Jean-Philippe on April 07, 2003 15 Comments, 0 TrackBacks

April 06, 2003

Du degré de complication des « relations humaines »

« Ce n'est pas aussi compliqué qu'on le raconte, les relations humaines : c'est souvent insoluble, mais c'est rarement compliqué. »

Michel Houellebecq, Plateforme (2001)
[pages 159-160, Éditions J'ai lu]

Posted by Jean-Philippe on April 06, 2003 28 Comments, 0 TrackBacks

Le « commerce des femmes »

« La seconde joie que m'apporta Valérie, ce fut l'extraordinaire douceur, la bonté naturelle de son caractère. Parfois, lorsque ses journées de travail avaient été longues – et elles devaient devenir, au fil des mois, de plus en plus longues – je la sentais tendue, épuisée nerveusement. Jamais elle ne se retourna contre moi, jamais elle ne se mit en colère, jamais elle n'eut une de ces crises nerveuses imprévisibles qui rendent parfois le commerce des femmes si étouffant, si pathétique. (...) »

Michel Houellebecq, Plateforme (2001)
[page 158, Éditions J'ai lu]

Posted by Jean-Philippe on April 06, 2003 15 Comments, 0 TrackBacks

Vivre sa vie comme un chien

« On peut caractériser la vie comme un processus d'immobilisation, bien visible chez le bouledogue français – si frétillant dans sa jeunesse, si apathique dans son âge mûr. »

Michel Houellebecq, Plateforme (2001)
[page 115, Éditions J'ai lu]

Posted by Jean-Philippe on April 06, 2003 21 Comments, 0 TrackBacks

April 04, 2003

Les autres me font vomir

« (...) C'est dans le rapport à autrui qu'on prend conscience de soi ; c'est bien ce qui rend le rapport à autrui insupportable. »

Michel Houellebecq, Plateforme (2001)
[page 89, Éditions J'ai lu]

Posted by Jean-Philippe on April 04, 2003 23 Comments, 0 TrackBacks

April 02, 2003

La société de la communication comme dérision

« La publicité échoue, les dépressions se multiplient, le désarroi s'accentue ; la publicité continue cependant à bâtir les infrastructures de réception de ses messages. Elle continue à perfectionner des moyens de déplacement pour des êtres qui n'ont nulle part où aller, parce qu'ils ne sont nulle part chez eux ; à développer des moyens de communication pour des êtres qui n'ont plus rien à dire ; à faciliter les possibilités d'interaction entre des êtres qui n'ont plus envie d'entrer en relation avec quiconque. »

Michel Houellebecq, Approches du désarroi - Le monde comme supermarché et comme dérision in Interventions (1998)
[pages 76-77, Éditions Flammarion]

Posted by Jean-Philippe on April 02, 2003 14 Comments, 0 TrackBacks

March 31, 2003

« Génération sacrifiée »

« Du point de vue amoureux Véronique appartenait, comme nous tous, à une génération sacrifiée. Elle avait certainement été capable d'amour ; elle aurait souhaité en être capable, je lui rends ce témoignage ; mais cela n'était plus possible. Phénomène rare, artificiel et tardif, l'amour ne peut s'épanouir que dans des conditions mentales spéciales, rarement réunies, en tous points opposées à la liberté des mœurs qui caractérise l'époque moderne. Véronique avait connu trop de discothèques et d'amants ; un tel mode de vie appauvrit l'être humain, lui infligeant des dommages parfois graves et toujours irréversibles. L'amour comme innocence et comme capacité d'illusion, comme aptitude à résumer l'ensemble de l'autre sexe à un seul être aimé, résiste rarement à une année de vagabondage sexuel, jamais à deux. En réalité, les expériences sexuelles successives accumulées au cours de l'adolescence minent et détruisent rapidement toute possibilité de projection d'ordre sentimental et romanesque ; progressivement, et en fait assez vite, on devient aussi capable d'amour qu'un vieux torchon. Et on mène ensuite, évidemment, une vie de torchon ; en vieillissant on devient moins séduisant, et de ce fait amer. On jalouse les jeunes, et de ce fait on les hait. Cette haine, condamnée à rester inavouable, s'envenime et devient de plus en plus ardente ; puis elle s'amortit et s'éteint, comme tout s'éteint. Il ne reste plus que l'amertume et le dégoût, la maladie et l'attente de la mort. »

Michel Houellebecq, Extension du domaine de la lutte (1994)
[pages 114, Éditions J'ai lu, collection Nouvelle Génération (2002)]

Posted by Jean-Philippe on March 31, 2003 19 Comments, 0 TrackBacks

March 30, 2003

« Enfin, c'est du passé. »

« Véronique était en « analyse », comme on dit ; aujourd'hui, je regrette de l'avoir rencontrée. Plus généralement, il n'y a rien à tirer des femmes en analyse. Une femme tombée entre les mains des psychanalystes devient définitivement impropre à tout usage, je l'ai maintes fois constaté. Ce phénomène ne doit pas être considéré comme un effet secondaire de la psychanalyse, mais bel et bien comme son but principal. Sous couvert de reconstruction du moi, les psychanlystes procèdent en réalité à une scandaleuse destruction de l'être humain. Innocence, générosité, pureté... tout cela est rapidement broyé entre leurs mains grossières. Les psychanalystes, grassement rémunérés, prétentieux et stupides, anéantissent définitivement chez leurs soit-disant patientes toute aptitude à l'amour, aussi bien mental que physique ; ils se comportent en fait en véritables ennemis de l'humanité. Impitoyable école d'égoïsme, la psychanalyse s'attaque avec le plus grand cynisme à de braves filles un peu paumées pour les transformer en d'ignobles pétasses, d'un égocentrisme délirant, qui ne peuvent plus susciter qu'un légitime dégoût. Il ne faut accorder aucune confiance, en aucun cas, à une femme passée entre les mains des psychanalystes. Mesquinerie, égoïsme, sottise arrogante, absence complète de sens moral, incapacité chronique d'aimer : voilà le portrait exhaustif d'une femme « analysée ».
Véronique correspondait, il faut le dire, trait pour trait à cette description. Je l'ai aimée, autant qu'il était en mon pouvoir – ce qui représente beaucoup d'amour. Cet amour fut gaspillé en pure perte, je le sais maintenant ; j'aurais mieux fait de lui casser les deux bras. Elle avait sans doute depuis toujours, comme toutes les dépressives, des dispositions à l'égoïsme et à l'absence de cœur ; mais sa psychanalyse l'a transformée de manière irréversible en une véritable ordure, sans tripes et sans conscience – un détritus entouré de papier glacé. Je me souviens qu'elle avait un tableau en Velléda blanc, sur lequel elle inscrivait d'ordinaire des choses du genre « petit pois » ou « pressing ». Un soir, en rentrant de sa séance, elle avait noté cette phrase de Lacan : « Plus vous serez ignoble, mieux ça ira. » J'avais souri ; j'avais tort. Cette phrase n'était encore, à ce stade, qu'un programme ; mais elle allait le mettre en application, point par point.
Un soir que Véronique était absente, j'ai avalé un flacon de Largactyl. Pris de panique, j'ai ensuite appelé les pompiers. Il a fallu m'emmener en urgence à l'hôpital, me faire un lavage d'estomac, etc. Bref, j'ai bien failli y passer. Cette salope (comment la qualifier autrement ?) n'est même pas venue me voir à l'hôpital. Lors de mon retour « à la maison », si l'on peut dire, tout ce qu'elle a trouvé comme mots de bienvenue c'est que j'étais un égoïste doublé d'un minable ; son interprétation de l'événement, c'est que je m'ingéniais à lui causer des soucis supplémentaires, elle « qui avait déjà assez à faire avec ses problèmes de boulot ». L'ignoble garce a même ajouté que je tentais de me livrer à un « chantage affectif » ; quand j'y pense, je regrette de ne pas lui avoir tailladé les ovaires. Enfin, c'est du passé. »

Michel Houellebecq, Extension du domaine de la lutte (1994)
[pages 103-105, Éditions J'ai lu, collection Nouvelle Génération (2002)]

Posted by Jean-Philippe on March 30, 2003 13 Comments, 0 TrackBacks

March 29, 2003

« Extension du domaine de la lutte »

« Je n'ai évidemment rien pu lui répondre ; mais je suis rentré à mon hôtel assez pensif. Décidément, me disais-je, dans nos sociétés, le sexe représente bel et bien un second système de différenciation, tout à fait indépendant de l'argent ; et il se comporte comme un système de différenciation au moins aussi impitoyable. Les effets de ces deux systèmes sont d'ailleurs strictement équivalents. Tout comme le libéralisme économique sans frein, et pour des raisons analogues, le libéralisme sexuel produit des phénomènes de paupérisation absolue. Certains font l'amour tous les jours ; d'autres cinq ou six fois dans leur vie, ou jamais. Certains font l'amour avec des dizaines de femmes ; d'autres avec aucune. C'est ce qu'on appelle la « loi du marché ». Dans un système économique ou le licenciement est prohibé, chacun réussit plus ou moins à trouver sa place. Dans un système sexuel où l'adultère est prohibé, chacun réussit plus ou moins à trouver son compagnon de lit. En système économique parfaitement libéral, certains accumulent des fortunes considérables ; d'autres croupissent dans le chômage et la misère. En système sexuel parfaitement libéral, certains ont une vie érotique variée et excitante ; d'autres sont réduits à la masturbation et la solitude. Le libéralisme économique, c'est l'extension du domaine de la lutte, son extension à tous les âges de la vie et à toutes les classes de la société. De même, le libéralisme sexuel, c'est l'extension du domaine de la lutte, son extension à tous les âges de la vie et à toutes les classes de la société. Sur le plan économique, Raphaël Tisserand appartient au camp des vainqueurs ; sur le plan sexuel, à celui des vaincus. Certains gagnent sur les deux tableaux ; d'autres perdent sur les deux. Les entreprises se disputent certains jeunes diplômés ; les femmes se disputent certains jeunes hommes ; les hommes se disputent certaines jeunes femmes ; le trouble et l'agitation sont considérables. »

Michel Houellebecq, Extension du domaine de la lutte (1994)
[pages 100-101, Éditions J'ai lu, collection Nouvelle Génération (2002)]

Posted by Jean-Philippe on March 29, 2003 17 Comments, 0 TrackBacks

« L'informatique me fait vomir »

« Je n'aime pas ce monde. Décidément, je ne l'aime pas. La société dans laquelle je vis me dégoûte ; la publicité m'écœure ; l'informatique me fait vomir. Tout mon travail d'informaticien consiste à multiplier les références, les recoupements, les critères de décision rationnelle. Ça n'a aucun sens. Pour parler franchement, c'est même plutôt négatif ; un encombrement inutile pour les neurones. Ce monde a besoin de tout, sauf d'informations supplémentaires.  »

Michel Houellebecq, Extension du domaine de la lutte (1994)
[pages 82-83, Éditions J'ai lu, collection Nouvelle Génération (2002)]

Posted by Jean-Philippe on March 29, 2003 18 Comments, 0 TrackBacks

Les « penseurs de l'informatique » sont-ils des « penseurs de l'évolution sociale » ?

« L'espèce des penseurs de l'informatique, à laquelle appartenait Jean-Yves Fréhaut, est moins rare qu'on pourrait le croire. Dans chaque entreprise de taille moyenne on peut en trouver un, rarement deux. En outre la plupart des gens admettent vaguement que toute relation, en particulier toute relation humaine, se réduit à un échange d'information (si bien entendu on inclut dans le concept d'information les messages à caractère non neutre, c'est-à-dire gratifiant ou pénalisant). Dans ces conditions, un penseur de l'informatique aura tôt fait de se transformer en penseur de l'évolution sociale. Son discours sera souvent brillant, et de ce fait convaincant ; la dimension affective pourra même y être intégrée. »

Michel Houellebecq, Extension du domaine de la lutte (1994)
[page 43, Éditions J'ai lu, collection Nouvelle Génération (2002)]

Posted by Jean-Philippe on March 29, 2003 16 Comments, 0 TrackBacks

Écrivain, lecteur

« Les pages qui vont suivre constituent un roman ; j'entends, une succession d'anecdotes dont je suis le héros. Ce choix autobiographique n'en est pas réellement un : de toute façon, je n'ai pas d'autre issue. Si je n'écris pas ce que j'ai vu je souffrirai autant – et peut-être un peu plus. Un peu seulement, j'y insiste. L'écriture ne soulage guère. Elle retrace, elle délimite. Elle introduit un soupçon de cohérence, l'idée d'un réalisme. On patauge toujours dans un brouillard sanglant, mais il y a quelques repères. Le chaos n'est plus qu'à quelques mètres. Faible succès, en vérité.
Quel contraste avec le pouvoir absolu, miraculeux de la lecture ! Une vie entière à lire aurait comblé mes voeux ; je le savais déjà à sept ans. La texture du monde est douloureuse, inadéquate ; elle ne me paraît pas modifiable. Vraiment, je crois qu'une vie entière à lire m'aurait mieux convenu.
Une telle vie ne m'a pas été donnée. »

Michel Houellebecq, Extension du domaine de la lutte (1994) [pages 14-15, Éditions J'ai lu, collection Nouvelle Génération (2002)]

Posted by Jean-Philippe on March 29, 2003 16 Comments, 0 TrackBacks

Entries on this page

Entries by category

Entries by month