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Rhapsody en demi-teinte

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July 07, 2004

Rhapsody en demi-teinte

Vous devez maintenant vous demander : pourquoi étais-je à la Fnac ? Bien sûr pour y trouver des disques, non pas pour draguer. En l'occurence, je vais parler de The Dark Secret de Rhapsody, que j'ai donc acheté, en Limited edition, sous la forme d'un digipack contenant un DVD bonus.
Pour ceux qui ne connaissent pas ce groupe italien, en gros, c'est du epic metal ; Rhapsody est le fondateur de ce genre musical, ou du moins, le groupe-phare. Ils sont certes copiés depuis quelques temps (citons par exemple les français Fayriland avec leur premier album Of Wars In Osyhria), mais ils ont plusieurs touches personnelles qui les rendent très particuliers.
Le compositeur principal, le génialissime maestro Luca Turilli, est un grand amateur de la musique classique (notamment Bach, Paganini, Vivaldi) et de musiques de films (Goldsmith, ainsi que le très sombre Elfman)... En fait, il est plus qu'amateur, il est profondément marqué par la musique classique (italienne, entre autres). Je ne connais pas tout les albums de Rhapsody, mais le Dark Secret est terriblement marqué par Vivaldi, et ses projets solos sentent bon la musique baroque (le permafrosté King of the Nordic Twilight et l'apocalyptique Prophet of the Last Eclipse sont excellents). Luca a commencé la guitare assez tard (16 ans), mais il jouait du piano et le la flûte avant de se lancer dans des aventures à 6 cordes. Cela a influencé ses solos par exemple, puisqu'ils sont basés sur des arpèges, et non sur des scales comme d'autres guitaristes. Notons aussi que je connais peu de groupes qui donnent autant d'importance aux flûtes à bec, et étant flûtiste, je suis comblé ! Bref, musique baroque, musique sacrée, musique des troubadours du Moyen-Age, musique de chambre... ils essaient de mélanger tout cet héritage à leur musique moderne.
Mais revenons à l'epic metal. À la base, c'est du speed metal, donc des gros riffs de guitare rapides et pas très mélodiques. Ne vous trompez pas, c'est pas si simple à jouer que ça, surtout de garder une rythmique aussi rapide et constante. Luca Turilli n'est pas un guitariste de la dernière heure, et il le prouve à chaque nouvel album ! C'est aussi lui qui écrit tous les textes, dont l'histoire se situe toujours dans des mondes heroic fantasy. Ajoutons à cela les orchestrations du clavier du groupe, Alex Straropoli, qui rajoute les harmonies (c'est l'autre grand compositeur, s'occupant généralement de toutes les parties orchestrales/symphoniques). Le chanteur, Fabio Lione... on apprécit ou on apprécit pas : c'est un chant assez « gueulard », haut perché, mais pas trop non plus ; cependant il a une véritable voix, c'est juste qu'il faut savoir l'apprécier... Ajoutons Patrice Guers à la basse et Alex Holzwarth à la batterie qui assure bien leur rôle (quoique parfois je préférerais entendre des percussions médiévales plus souvent).
Sur The Dark Secret, s'ajoute l'acteur Christopher Lee (Star Wars, Lord of the Rings) qui déclame tous les textes de l'histoire. Et oui, car le Dark Secret est une évolution du epic metal voulu par Rhapsody, ce qu'ils nomment l'hollywood metal, ce qu'il faut comprendre comme la fusion entre ce qu'il faisait eux-mêmes avant et les musiques de films. Pari réussi ?
Et bien mon avis est mitigé, aussi bien sur l'album, le DVD qui vient avec, et le concept même d'hollywood metal.
Expédions rapidement le DVD qui contient un mini-film sur la saga heroic fantasy de Rhapsody, The Emerald Sword, à l'intérêt cinématographique limité ; aussi un making-of vraiment minimal (même si c'est sympa de voir Straropoli et Turilli, surtout quand Turilli parle anglais avec son gros accent italien lol ça vous donne envie de manger des pâtes !), interviews dans lesquels on voit surtout Christopher Lee, pas très convainquant dans ses explications... et rien sur l'enregistrement, ou si peu. Ensuite le clip vidéo du titre Unholy Warcry, et le même titre en 5.1 (d'un usage limité pour moi qui n'est pas d'équipement 5.1, mais ça se trouve le mixage est génialissime...). Bref, on est très très très loin du DVD fourni avec The Human Equation de Ayreon/Arjen Luccassen (dont je vais parler dans une autre entrée, ça vous n'y couperez pas, car c'est peut-être l'oeuvre musicale de 2004, dont vous n'entendrez jamais parler... n'est pas Jennifer de la StarAc' qui veut).
C'est justement ce DVD qui montre grandement l'une des faiblesse du hollywood metal. Même si Rhapsody commence à être très connu, respecté et tout ce qu'on veut, je ne pense pas qu'ils aient les moyens des studios hollywoodiens. Or, leur musique ce rapproche de la bande son d'un film comme The Lord of the Rings, et le budget nécessaire pour mettre en oeuvre leur saga est énorme... or leur clip vidéo fait un peu pitié... Pourtant, quand j'écoute un album de Rhapsody, j'imagine toutes les scènes, toute l'histoire, tout est toujours fabuleux et mythique... Voilà, c'est tout, les films font « kitsch » (on me rétorquera que les groupes métal sont souvent kitsch lol). Maintenant, comme le dit Christopher Lee dans le making-of, on assiste peut-être avec cet album à un tournant dans l'histoire de la musique. On peut en effet imaginer qu'avec les progrès de l'animation virtuelle, on arrive bientôt à mettre en scène des films en images de synthèse à faible budget, mais incroyablement réaliste et tout à fait adapté à la mise en images de sage d'heroic fantasy, une sorte de Chroniques de la Guerre de Lodoss (Record of Lodoss War) de synthèse. Je l'espère. Espérons aussi que le metal prendra de l'ampleur sans se perdre. La musique classique n'est plus first-class, je ne vois pas en quoi le jeu de guitare de Turilli proche de celui d'un flutiste baroque pourra conquérir des foules immenses.
Passons à la musique en elle-même. Signalons tout d'abord que The Dark Secret n'est pas un album mais un mini-album, l'album complet sortira à la rentrée. Nous n'avons ici qu'un aperçu de la suite de la saga The Emerald Sword.
Autant dire tout de suite qu'il y a du monde sur cet album : entre l'orchestre Bohuslav Martinu Philarmonic Orchestra de République Tchèque, deux groupes de choeurs (l'habituel Epic Choir et le Brno Academy Choir), un ensemble baroque (la flûte à bec est joué par un certain Manuel Straropoli.... sûrement un membre de la famille d'Alex), Rhapsody, Christopher Lee et toutes les équipes techniques, on arrive facilement à plus d'une centaine de personnes.
Cinq titres :


  • Unholy Warcry (Edit Version), le titre principal. Du pur Rhapsody, avec de sombres orchestrations de l'ensemble de cordes pour soutenir les riffs de la guitare. Ce n'est pas varié, et si comme Pierre-Jean vous n'aimez pas le côté « grandiloquant » de Rhapsody, vous allez souffrir, car les choeurs en rajoutent :-)

  • Thunders Mighty Roar, Storm de Vanessa-Mae à la sauce Rhapsody, ce qui n'empêche pas que ça sonne puissamment Vivaldi. La maîtrise de Turilli à la guitare lors de ses interventions est impressionante, le clavier/clavecin suit bien, appuyé par un ensemble de cuivres imposant. Pour le reste c'est du Rhapsody traditionnel.

  • Guardian Of Destiny (English Version) qui est introduit par une flûte baroque, une guitare classique et un tambourin. Ca fait vraiment musique de troubadour. Puis une voix soprano se pose tranquillement sur la mélodie de guitare avant l'arrivé de Fabio, très calme. On entend une cornemuse en fond (je me trompe peut-être). C'est le titre où les choeurs sont le mieux utilisés je trouve (excessivement dramatiques, accompagnant la voix de Fabio), avec un soutien de l'orchestre impressionnant et une flûte à bec très mélodieuse.

  • Sacred Power Of Raging Winds. Titre à la structuration bizarre de plus de 10 minutes introduit par une guitare dantesque. Un duel violon / flûte à bec intéressant, débouchant sur un solo à la flûte à bec qui me laisse bouche bée vue la qualité du son obtenu (et des effets de vibrato/trilles vraiment osés). Intermèdes classiques de grandes qualités, que cela soit pour la musique baroque ou les parties symphoniques, solo guitare toujours aussi léché, solo clavier sympathique : moi je dis bravo, mais manque de structure cohérente lol. Bref, jugez par vous même, il est en écoute sur ce site !

  • Non Ho Sonno (Remix). Ca sonne très musique atmosphérique gothique (genre certains passages de Penumbra), et ce n'est apparemment pas composé par Rhapsody... je ne sais pas ce que ça fait là, mais c'est sympa, ça fait musique de films...


Bref, du grand Rhapsody, une évolution prometteuse, mais loin de ce à quoi je m'attendais après leurs effets d'annonces. Je suis surtout déçu par l'utilisation des choeurs, trop dans le style de Rhapsody (fallait s'y attendre du coup), cassant complètement la rythmique des morceaux, façon Gloria de Vivaldi. Maintenant l'album complet sera je pense nettement plus cohérent.
À n'acheter que si vous êtes fan.

Posted by Jean-Philippe on July 07, 2004 at 08:32 PM 27 Comments, 487 TrackBacks

Filed in Rhapsody, metal, music

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Comments

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Greetings

Posted by Jenny on November 09, 2004 at 08:41 AM (Spam: 0%)

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